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Le magazine de référence du marché de l’art

Saint-Barthélémy, décryptage

Nous nous retrouvons aujourd’hui, une fois de plus, pour un décryptage iconographique. Le saint du jour est tristement célèbre car son nom est associé à un massacre qui a fait date dans l’histoire de France. 

Mais, pour autant, ce saint connaissait une histoire bien avant le 16eme siècle et c’est ce que je me propose de vous narrer aujourd’hui, pour que vous puissiez le reconnaître au détour de tableaux, de retables, de statues ou même du calendrier…

Je vous propose un format aujourd’hui pour que vous puissiez décrypter la représentation de cet homme au couteau. 

 

Saint Barthélemy est un saint, mais pas seulement. Il fait également partie des apôtres. C’est-à-dire qu’il a rencontré le Christ. C’est pourquoi il connaît une postérité iconographique importante.

 

Attendez…faisons un point sur ce qu’est un apôtre non ?

Qui sont les apôtres ? Que sont les apôtres ?

Ici, nous avons besoin des lumières des théologiens. C’est Michel Pastoureau, dans son ouvrage  « Comprendre la bible et les saints » qui nous donne quelques clés.
D’abord, apôtres au sens propre, signifie “envoyés” car les apôtres sont les disciples que le Christ a envoyé évangéliser les nations. De façon à essaimer sa bonne parole. 

Plus tard, cependant, le terme désigne plutôt un petit nombre de saints, non plus seulement les apôtres contemporains de Jésus. 

À l’origine, les apôtres étaient douze. Ils formaient un collège dont le but était d’attester que Jésus, qu’ils ont connu, était bien le Messie. 

On trouve leur liste dans le Nouveau Testament, qui les énumère.

Ils sont présentés de façon méthodique : d’abord les 4 disciples qui ont étés appelés les premiers : 

  • Pierre
  • André 
  • Jacques le Majeur 
  • Jean 

 

Viennent ensuite : 

  • Philippe
  • Barthélémy 
  • Matthieu
  • Thomas 

 

Puis enfin : 

  • Jacques le Mineur
  • Thadée ( ou Jude )
  • Simon
  • Judas Iscariote 

 

Généralement, Pierre occupe toujours la première place et Judas vient toujours en dernier. Il a été remplacé par Matthias après sa trahison.

La piété populaire a transformé tous les apôtres en martyrs et la légende leur a attribué différents supplices  :

  •  5 auraient subi le supplice de la croix comme Jésus.
  •  Pierre et Philippe la tête en bas ( car ne se sentant pas digne d’être crucifiés comme Jésus ) 
  • André sur une croix en X. 

Barthélémy, bien que mentionné parmi eux, ne joue aucun rôle dans les Actes de Apôtres, ni dans les Évangiles. Cependant, Michel Pastoureau nous apprend qu’il est parfois appelé Nathanael. Cela nous aide car on le retrouve ainsi dans un texte des Evangiles, nous y reviendrons.  

Cependant, s’il n’a pas de rôle clé dans les textes, sa mission d’évangélisation, elle, était ambitieuse! 

Il passe pour avoir évangélisé l’Arabie et la Mésopotamie, être allé jusqu’aux Indes, puis avoir subi le martyre en Arménie,  sur ordre du roi Astyage.

Mais alors, qu’en dit la Bible ? Ici, il s’appelle Nathanaël, ça tombe bien, Michel Pastoureau nous avait prévenu qu’il pouvait être désigné par ce nom. L’extrait en question se situe dans l’Evangile de Jean ( 1;  43-51 ). 

Philippe, un des premiers hommes à rejoindre Jésus, vient trouver Nathanael pour l’informer du fait que celui dont parlaient tous les hommes, le Messie tant attendu est enfin là, sous les traits de Jésus. 

Mais Nathanael doute fortement, il répond d’ailleurs à Philippe “De Nazareth peut-il sortir quelque chose de bon ?” 

Qu’à cela ne tienne, Philippe ne lui répond pas et l’enjoint plutôt à les suivre. 

Nathanael rencontre Jésus, et lorsque Jésus s’exprime à propos de notre homme il dit “ Voici vraiment un Israélite, il n’y a pas de ruse en lui.” Ouf ! Barthélémy est donc bien validé aux yeux de Jésus pour faire partie de ses “envoyés”

Mais Barthélemy / Nathanaël s’interroge alors : comment Jésus pourrait-il le connaître ? Une réponse de Jésus suffit pour le convaincre qu’il est le Messie: “Je t’ai vu sous le figuier.”

Alors là, nous pourrions nous interroger sur le sens de cette phrase, de cette rencontre. Heureusement, Jean-Yves Leloup, philosophe et théologien, est là pour nous éclairer. Il fait l’exégèse de ce passage. 

Être sous le figuier selon lui, c’est être en train de méditer sur les Ecritures. Les feuilles du figuier symbolisent ce qui cache notre néant, notre nudité intérieure, comme on pourrait utiliser un mur de paroles pour le cacher.

C’est sans doute à cet égard que Jésus affirme que Nathanaël est pur, exempt de ruse. Et c’est aussi à cette occasion que Nathanaël devient Barthélémy, en réalisant qu’il a en face de lui la Conscience même.

Mais à quoi ressemble notre homme ?

Il nous faut savoir à qui nous avons affaire si cet article a pour but de vous permettre de le reconnaître. Donc une petite description s’impose : simple mais très parlante ! 

Barthélemy aurait donc : 

  • les cheveux crépus et noirs
  • le teint pâle
  • les yeux grands
  • le nez régulier et droit
  • la barbe longue et mêlée de poils blancs
  • le visage joyeux et gai 

 

Aussi, relativement à son martyr, il est presque toujours représenté écorché, car c’est son martyr. C’est-à-dire la façon dont il a été tué. Il est donc communément représenté avec un couteau, car c’est avec un couteau qu’il a été tué. Mais aussi : 

  • Portant sa peau sur ses épaules, ou son bras ( comme dans la chapelle Sixtine , où Michel Ange s’est portraituré sous ses traits ! )
  • Subissant son supplice.
  • Crucifié la tête en bas pour faciliter le travail de ses bourreaux.
  • Avec une complaisance morbide pendant son supplice.

 

Plusieurs églises d’Occident prétendent garder des parties plus ou moins grandes de peau. Celle-ci lui vaut d’être le saint patron de tous les corps de métiers en rapport avec les préparations des peaux et le travail du cuir : bouchers, tanneurs, corroyeurs, gantiers, relieurs.

D’ailleurs, s’il est autant représenté c’est parce que dans beaucoup de villes, ces métiers riches et puissants ont commandité des œuvres d’art le représentant. 

Il porterait aussi une tenue simple : une robe sans manches avec des noeuds de couleur pourpre à chaque coin. On nous dit qu’il porte ses habits et ses sandales depuis plus de vingt ans et que, comme par miracle, ils ne s’usent pas.

Pourtant, notre homme voyage beaucoup ! 

Pour en savoir davantage sur sa vie et les voyages qu’il a entrepris pour évangéliser, conformément à sa mission d’apôtre, nous pouvons nous reporter à La légende dorée de Jacques de Voragine. C’est un ouvrage de référence dans le monde médiéval concernant la vie des saints. D’ailleurs, savez-vous comment on appelle l’étude de la vie des saints ? L’hagiographie. De hagios, saint et grapho écrire.  

Pour comprendre la vie de saint Barthélemy,  il nous faut alors partir pour…les Indes! Un peu d’exotisme ne fait pas de mal. 

Voici alors ce que rapporte Jacques de Voragine sur la vie de celui qui nous intéresse aujourd’hui  : 

L’apôtre Barthélemy se rendit aux Indes, qui sont placées à l’extrémité du monde. Là, il entra dans un temple où était une idole nommée Astaroth, et il s’installa dans ce temple comme un pélerin.

Or l’idole Astaroth était habitée par un démon qui prétendait guérir les maladies, encore que, en réalité, il ne les guérit point, mais empêchait seulement les malades de souffrir.”

Et voici qu’ une foule énorme de pèlerins étant rentrée dans le temple où était l’idole, celle-ci refusa complètement d’exercer sur les malades son action accoutumée. Les pèlerins se rendirent alors dans une ville voisine nommée Bérith, et ils demandèrent à celle-ci pourquoi Astaroth les laissait sans réponse.
Bérith leur dit “c’est qu’Astaroth est chargée de chaînes de feu qui ne lui permettent ni de parler, ni de respirer, et cela depuis l’instant où l’apôtre saint Barthélemy est entré dans le temple. 

Et eux : “ Qui est donc ce Barthélémy “? et le démon Bérith : 

“C’est un ami du dieu du ciel, venu dans notre province pour en chasser tous les dieux indiens.”

et eux : “ À quel signe pourrons nous le reconnaître ? “ 

Et Bérith “ il a les cheveux noirs et crépus, la chair blanche, les yeux grands, les narines égales et bien ouvertes, la barbe épaisse avec quelques poils blancs, la stature moyenne; et il est vêtu d’un manteau blanc avec des pierres rouges aux angles. Il aurait 26 ans d’âge. Et cette propriété que son vêtement et ses sandales ne peuvent ni s’user, ni se salir, bien que cent fois, jour et nuit, il s’agenouille pour prier. Quand il marche, des anges l’accompagnent, l’empêchant de se fatiguer et de souffrir de la soif. 

Toujours joyeux d’âme et de visage, il sait tout, comprend toutes les langues, prévoit tout, et déjà, il sait que je vous parle en ce moment.

Je vous en prie, s’il consent à se montrer à vous, demandez-lui de ne point venir ici, car ses anges ne manqueraient pas de me traiter comme ils ont traité mon compagnon Astaroth.” 

On chercha donc Barthélémy pendant des jours sans pouvoir le découvrir. 

Cependant, comme l’apôtre passait dans une rue, un démon s’écria, par la bouche d’un possédé : “Barthélémy, apôtre de Dieu, tes prières me brûlent”! Et aussitôt le possédé se trouva délivré. 

La nouvelle du miracle parvint alors au roi du pays, qui s’appelait Polème. 

Comme celui-ci avait une fille folle, il fit prier l’apôtre de venir la guérir.

L’apôtre vint, et trouva la jeune fille liée avec des chaînes, car elle mordait ceux qui l’approchaient.

Il ordonna aussitôt de la délivrer : et comme les ministres du roi n’osaient la toucher, il leur dit : “Ne craignez rien car j’ai déjà enchaîné le démon qui était en elle’ 

Et, en effet, dès qu’on lui eut ôté ses chaînes, elle recouvra l’esprit.

Alors le roi fit placer sur des chameaux tout un trésor d’or, d’argent et de pierres précieuses, et ordonna qu’on le portât à l’apôtre, qui était reparti. Mais, en vain, on le chercha dans tout le royaume.

Le lendemain, le roi était seul dans sa chambre lorsque Barthélémy lui apparut et lui dit : 

“Pourquoi m’as tu fait chercher, hier, avec tes présents?” Ces présents sont nécessaires à ceux qui désirent des choses terrestres mais non à moi qui ne désire rien de terrestre !” Après quoi il exposa à Polème le mystère de notre rédemption et les sacrements de la foi. 

Et il ajouta que, si le roi voulait recevoir le baptême, il se chargerait ensuite de lui montrer son ancien dieu tout lié de chaînes. 

Le lendemain, comme les prêtres sacrifiaient aux idoles près du palais du roi, le diable se mit à leur crier : 

“Malheureux, cessez de m’offrir des sacrifices : car je suis enchaîné de chaînes de feu par un ange de Jésus-Christ, que les juifs ont crucifié ! Ce Jésus a dompté la mort elle- même, notre souveraine, et il a enchaîné notre prince, qui est l’auteur de toute mort ! “

Aussitôt la foule voulut abattre les idoles, à grand renfort de cordes ; mais on ne put y parvenir. Alors l’apôtre ordonna au démon de sortir de l’idole et de briser celle-ci. Et aussitôt le démon sortant de l’idole, mis en pièces celle-ci et toutes les autres. 

L’ange leur montra un Ethopien tout noir, au visage pointu, avec une barbe touffue, des poils sur tout le corps, des yeux enflammés, une bouche vomissant du soufre et les mains enchaînées derrière le dos. 

Alors le roi se fit baptiser avec sa femme, son fils et tout son peuple. Désormais, renonçant à sa royauté, il devint disciple de l’apôtre. 

Les prêtres des idoles, chassés par Polème* se rendirent auprès du frère de celui-ci, Astyage, et se plaignirent devant lui des méfaits de l’apôtre. Astyage, furieux, envoya à la recherche de Barthélémy toute une armée qui finit par s’emparer de lui. Et Astyage : “Est-ce toi qui a séduit mon frère ? “ Et l’apôtre : “ je ne l’ai point séduit, mais converti !” 

Et Astyage : “de même que tu as amené mon frère à abandonner ses dieux pour le tien, de même je saurai bien te faire abandonner ton Dieu pour sacrifier aux miens !” 

Et l’apôtre : “Le dieu qu’adorait ton frère, je l’ai enchaîné, au vu de tous, et forcé à détruire ses idoles ! Si tu parviens à faire subir le même traitement à mon DIeu, je consentirai à adorer tes simulacres ; mais si tu n’y parviens pas, je détruirai tes simulacres pour que tu croies en mon Dieu.”


A peine avait-il ainsi parlé, qu’on vint annoncer au roi que son idole Baldak venait de tomber de son piédestal et de se briser en morceaux.
Ce qu’apprenant le roi, furieux, déchira en deux son manteau de pourpre, ordonna que l’apôtre fut battu de verges et le fit enfin écorché vif. 

Les chrétiens enlevèrent le corps du martyr, et lui accordèrent les honneurs qui lui étaient dus.

Quant au roi Astyage et aux prêtres des idoles, ils furent saisis par des démons et périrent misérablement. Au contraire, l’ex roi Polème* fut ordonné évêque, et durant vingt ans s’acquitta saintement des devoirs de l’épiscopat. 

Mais alors, il reste une question à élucider.  Selon les exégèses du saint, il y a plusieurs possibilités concernant son martyr, les différentes parties ne sont pas toutes d’accord. Voyons plutôt :

  • Saint Dorothée affirme que notre homme a été crucifié – la tête en bas- et spécifie que ce drame a eu lieu en Arménie. Cette spécificité de la crucifixion la tête en bas est assez populaire, elle renvoie souvent à la crucifixion de saint Pierre, qui a demandé à être crucifié la tête en bas, car il ne se sentait pas assez digne pour être crucifié de la même façon que son Messie, Jésus. 
  • Saint Théodore assure quant à lui que l’apôtre a été écorché vif. D’où notre représentation avec un couteau : ce n’est autre que l’instrument de son martyr. 

D’ailleurs Théodore nous apprend que dans la fureur, ses bourreaux jetèrent son corps à la mer et..c’est la prochaine partie de notre histoire.

  • D’autres historiens prétendent qu’il a eu la tête tranchée. 


Ces contradictions ne sont qu’apparences car rien n’empêche de penser que le saint ait été d’abord mis en croix puis, pour plus de souffrances, écorché vif, et enfin décapité !

De l’Orient…. à l’Occident : la boucle est bouclée !

Une fois les récits narrés de la vie puis du martyr de Barthélemy, il nous reste cependant toute une partie à étudier concernant la postérité de son culte. Et vous allez voir, le voyage n’est pas prêt d’être terminé. C’est exotique et un peu magique.

Vous voyez souvent des volcans changer de position ? Des os phosphorescents?  Cap sur la Sicile ! 

Là où le corps de notre saint s’est échoué, sur l’île de Lipari. Son corps a été retrouvé par l’évêque d’Ostie. Toujours selon Jacques de Voragine : 

A Lipari étaient les restes de saint Barthélémy, des hommes d’églises ayant vu les restes,  poursuivirent leurs routes vers d’autres régions. 

Papin, l’un deux, se rendit dans une ville de Sicile appelée Milas ; un autre, Lucien parvint à Messine ; les deux derniers furent envoyés par Dieu en Calabre : Grégoire dans la ville de Colonne, Achace dans la ville de Chalé.  

Quant au corps de Barthélémy, il fut reçu à grand renfort d’hymnes et de cierges, vers un temple magnifique. Et le mont de Vulcain, qui lançait des flammes jusque sur les habitants de Lipari, s’éloigna soudain à sept stades de là, de telle sorte qu’aujourd’hui encore, en se dressant au bord de la mer , il apparaît comme la figuration d’un feu prenant la fuite. 

Mais ce n’est toujours pas fini ! L’histoire reprend au quatrième siècle avec l’invasion par les Sarrasins de l’île de Lipari.

Saint Barthélemy ou les os de feu ! 

L’an du Seigneur 331, les Sarrasins ayant envahi l’île de Lipari brisèrent le tombeau de saint Barthélemy et dispersèrent ses os. Mais à peine eurent-ils quitté l’île que le saint apparut à un moine et lui dit : “Lève- toi et recueille mes os, qui sont dispersés !” Et le moine : “ Pourquoi recueillerais-je tes os ou te rendrais-je un honneur quelconque, à toi, qui as laissé dévaster notre île sans nous prêter secours ? 

Et le saint  : “Pendant  longtemps, le seigneur sur ma prière, a épargné ce peuple ; mais ses péchés sont devenus si nombreux que je n’ai plus pu obtenir leur pardon.”

Le moine lui demanda alors à quel signe il pourrait reconnaître ses os, parmi ceux que les Sarrasins avaient dispersés. 

Et le saint “ Va les chercher pendant la nuit, et recueille ceux que tu verras briller comme du feu” Le moine fit ainsi ,recueillit les os de l’apôtre et les transporta par mer à Bénévent, métropole de la Pouille.

Et encore aujourd’hui les habitants de Bénévent prétendent posséder le corps de saint Barthélémy, bien que d’après l’opinion générale, ce corps se trouve désormais à Rome.

Car, l’empereur Frédéric s’étant emparé de Bénévent, avait ordonné de détruire toutes les églises de la ville. Or, voici qu’un habitant de celle-ci aperçut des hommes vêtus de blanc, et tous resplendissants, qui semblaient s’entretenir entre eux. Il demanda à l’un d’eux qui ils étaient et l’inconnu répondit “ celui que tu vois là-bas est l’apôtre Barthélemy, et nous sommes les autres saints qui avions des églises dans cette ville. Nous nous sommes réunis ici pour nous entendre sur le châtiment que nous devions exiger contre l’impie qui nous a chassés de nos demeures. 

Et nous venons de juger qu’il aura à comparaître sans retard devant le tribunal de Dieu, pour rendre compte de son sacrilège” . Et en effet, peu de temps après, ledit empereur périt misérablement.

Encore un peu et nous avons l’impression que l’histoire de notre saint du jour ne s’arrête jamais…et va un peut partout dans le monde. Lipari, Rome, Arménie…de quoi avoir le tourni.

Selon certaines sources, les reliques du saint ont donc été déposées dans un cercueil de plomb, jeté à la mer. Puis le cercueil aurait : 

  1. traversé la mer Noire et l’Hellespont
  2. Passé par la mer Egée et la mer Adriatique
  3. s’est arrêté sur l’île de Lipari 

Mais pour d’autres : 

  1. Reliques transférées à Martyropolis, dans l’est de l’Anatolie
  2. Puis à Dara en Mésopotamie sur l’ordre de l’empereur byzantin
  3. dans l’église  que Justinien a fait construire pour le martyr à Phrygie
  4. puis en 580 les reliques auraient été transférées à Lipari.

Dans tous les cas, c’est le transfert des reliques de saint Barthélemy à Lipari que l’Eglise marque le 25 août.

On lit encore :

Pendant l’office, le jour  de la saint Barthélemy, le diable apparut à l’officiant sous la forme d’une jeune fille merveilleusement belle.

Le maître l’invita à sa table, ne sachant qui elle était, et elle s’efforçait de l’exciter par ses caresses. Or, voici que saint Barthélemy se présenta devant la porte en habits de pèlerin, et pria qu’on le reçut au nom du saint Barthélemy. 

La femme engagea le prêtre à lui envoyer du pain sans le recevoir ; mais le pélerin refusa d’y toucher. Et il fit demander au prêtre de lui faire dire ce qui était le plus propre à l’homme. La jeune femme lui fit répondre : “C’est le péché, avec lequel l’homme est conçu, nait et vit.” Le pèlerin déclara la réponse exacte. 

Il fit ensuite demander au prêtre de lui dire quel était le lieu n’ayant qu’un seul pied, et où Dieu avait opéré son plus grand miracle. Le prêtre fut d’avis que c’était la croix : la femme dit “c’est la tête de l’homme dans laquelle Dieu à créé comme un second monde en raccourci”. Le pèlerin approuva les deux réponses. Puis il fit demander, en troisième lieu,  quelle distance il y avait du sommet du ciel au fond de l’enfer. Le prêtre répondit qu’il l’ignorait, mais la femme : “Helas, je le sais, moi, car j’ai franchi cette distance et je vais la franchir à nouveau !” Après quoi, cette femme reprenant sa forme de diable, se précipita dans l’abîme avec un grand cri , et quand on chercha ensuite le pèlerin, on ne le trouva plus. 

 

Quel sens au culte hier et aujourd’hui?

C’en est fini des textes dont nous disposons. Mais cela est loin de signifier que le saint n’est plus présent dans nos vies modernes. 

D’abord l’église le fête toujours le 25 août. Et nous allons voir avec ce qui suit que c’est loin d’être un choix anodin.

Barthélemy ou les moutons ?

Le 25 août, dans la tradition roumaine, c’est une fête que l’on connaît sous le nom de “fêtes des Vartolomei.” Donc bien en lien avec notre homme. Mais, elle symbolise surtout le passage de l’été à l’automne. C’est à cette occasion, que l’on soigne les animaux et qu’on les prépare pour qu’ils surmontent l’hiver qui arrive. 

L’ethnologue Florin-Ionut Pilip Neacsu nous en dit davantage à ce sujet : la fête de saint Barthélemy, selon le folklore romain, permet au jour de se “tourner” c’est-à-dire qu’à partir du 25 août, les jours connaîtront moins de lumière et le coucou ne chantera plus. C’est une fête intimement liée au pâturage.

Les pâturages étant l’une des principales occupations des communautés roumaines. Ainsi, lors de cette fête, il est interdit de filer la laine, d’aiguiser un couteau ou de préparer la polenta.

Ici, il est intéressant de noter la conjonction entre une fête chrétienne et une célébration agraire immémorielle. 

Encore aujourd’hui cette fête est connue et respectée des bergers. Et plusieurs bergers ont fait de saint Barthélémy leur patron. Car c’est bien sous son patronage que l’année passe à  la saison froide. 

Pas de jaloux, on retrouvera donc saint Barthélemy autant sur des bâtiments, des objets en lien avec des professions du cuir, de la peau, qu’en lien avec le monde agricole : chaque contexte socio-culturel est déterminant dans la réception que l’on a d’un symbole. 

Maintenant, vous savez tout : le couteau, l’Arménie, les os phosphorescents, la Sicile, les Indes, le figuier, les apôtres, les pâturages… à vous de jouer pour le reconnaître !

SITOGRAPHIE & BIBLIOGRAPHIE

https://www.eglisesduconfluent.fr/Pages/Pe-Barthelemy.php

https://www.rri.ro/fr_fr/les_traditions_autour_de_la_fete_de_saint_barthelemy-2688922

https://fr.wikipedia.org/wiki/Barth%C3%A9lemy_(ap%C3%B4tre)

https://hozana.org/saints/saint-barthelemy 

https://www.callianthus.fr/blog-semiologie/le-coucou?rq=coucou

Pastoureau Michel, Duchet-Suchaux Gaston, La Bible et les saints, Editions Flammarion, Paris, 2021.

Voragine Jacques, La légende dorée, Editions Gallimard, Paris, 2004.

Extrait de la formation de Jean Yves Leloup sur Les arbres dans les Écritures à propos du figuier de Nathanaël dans le passage : Jean 1, 45-50.